Résumé:
Hétérogène, complexe, vulnérable, la population des personnes âgées a longtemps été exclue des essais cliniques. Résultat de la pression démographique, le souci de son inclusion est aujourd’hui réel, et fait resurgir les difficultés éthiques associées à son consentement lorsque les fonctions cognitives s’altèrent. Eclairé par de nombreux travaux établissant les limites du consentement substitué dans sa capacité à retranscrire les choix du patient, ce travail a pour objectif d’explorer la validité intrinsèque d’un tel mode de consentement et d’établir les éléments fondant la décision des personnes de confiance. MATERIELS ET METHODE : Après recherche bibliographique, un panel de facteurs susceptibles d’influer sur le consentement formulé par la personne de confiance est identifié : âge, situation dans l’entourage du patient, état de santé du patient, expérience personnelle de recherche, discussion préalable avec le patient, connaissance des mesures d’encadrement de la recherche. Un questionnaire est réalisé, à destination des personnes de confiance des patients hospitalisés dans l’Unité Gériatrique Léonard de Vinci 1 (Hôpital Général du Mans). Associant questions fermées et questions ouvertes permettant les justifications, l’étude est réalisée sans critères d’exclusion, respectant l’esprit de la loi du 4 mars 2002. RESULTATS : 55 patients sont hospitalisés dans l’unité. 51 personnes de confiance sont sollicitées. 13,7% d’entre elles s’avèrent incapables de répondre à au moins 5 questions importantes, parmi lesquels 84% ont plus de 65 ans. 23% des interviewés ont une expérience personnelle ou rapportée d’essai de médicament, tous étant des enfants de moins de 65 ans (sauf 1). Seuls 6% ont discuté par le passé avec leur proche hospitalisé de sa position à l’égard des essais de médicaments. Aucun ne connaît les Comités de Protection des Personnes. Le principe du consentement substitué apparaît rassurant pour 94%, alors que le principe du consentement présumé tel qu’établi par la loi Caillavet est perçu comme choquant pour 57% des interviewés, l’accord de la famille étant nécessaire pour 71%. Concernant le consentement à un essai pour leur proche hospitalisé, 41% le donnent a priori, 31% selon le rapport bénéfice/risque, 6% émettant un refus, 22% estimant ne pas être en mesure de prendre la décision. Pour 73%, le fait de discuter avec le proche lorsqu’il a encore toutes ses capacités pour décider est nécessaire. DISCUSSION : Réaffirmant ainsi les limites du consentement substitué, l’étude souligne la situation incongrue de personnes de confiance elles même affectées de troubles des fonctions supérieures dans le grand âge et sollicitées pour choisir pour le patient, elle rappelle l’ignorance le plus souvent des souhaits du patient, le non-respect assumé de ses souhaits lorsqu’ils sont pressentis. Elle rappelle encore la persistance de pratiques paternalistes sollicitées par les proches de patients, ainsi que la préoccupation utilitariste dont font part certains, en réelle contradiction avec le respect de l’autonomie (qui fonde le consentement substitué). Elle identifie enfin 2 éléments forts influant sur le consentement pour autrui : l’expérience préalable de la recherche et les convictions personnelles. CONCLUSION : Afin de fonder le consentement substitué sur les souhaits, valeurs ou croyances des personnes âgées, celles-ci devraient être encouragées à faire part de directives de recherche anticipées. Les places prépondérantes du conseil de famille et du médecin traitant dans l’aide à la décision devraient être reconnues. Enfin l’information et la transparence sur l’encadrement de la recherche devraient être favorisées.