Le consentement des proches en recherche biomédicale
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<p>Le consentement des patients qui se prêtent à une recherche médicale est une donnée issue de la loi Huriet de 1988. Ce texte prévoit en outre que, en cas d’incapacité du sujet expérimental à consentir, l’avis des membres de leur famille soit alors recherché. Cette notion a été complétée récemment par celle de « personne de confiance » dans la Loi du 4 mars 2002, dite de « Démocratie sanitaire ». Pourtant, cette recherche d’un consentement substitué pose de nombreux problèmes, décrits depuis plus de trente ans par différents auteurs de langue anglaise. Parmi eux, Warren, en 1986, a montré que parmi les proches qui donnaient un consentement substitué à l’inclusion dans une recherche de patients âgés, 31 % affirmaient que ces derniers ne seraient pas d’accord avec cette inclusion. Un article plus récent de Coppolino a montré, en 2001, qu’il existait des discordances importantes entre consentement des proches et consentement des patients, lors de deux simulations de recherche en chirurgie cardiaque : entre 16 % et 21,3 % de faux positifs (proches donnant leur accord, contre l’avis réel du patient), selon le protocole testé. Ces résultats laissent planer un doute sur l’efficience du consentement substitué comme moyen de protection des personnes se prêtant à une recherche biomédicale. Néanmoins, ils proviennent tous d’articles anglo-saxons et il n’est pas certain que les mêmes chiffres soient retrouvés en France, pour des raisons entre autres culturelles. Nous avons donc conduit une nouvelle enquête sur ce sujet, dans un Service de Réanimation français, à Orléans : 40 patients conscients et compétents, et 40 personnes de confiance désignées par eux, ont été inclus dans une étude sur le consentement substitué, lors d’une recherche simulée sur les méthodes de mesure de la glycémie. Les principaux résultats sont les suivants : 95% des patients versus 92,5% des personnes de confiance (p=0,019) ont donné leur consentement à la recherche. 8,2% des proches donnent leur consentement tout en affirmant que le patient ne serait pas d’accord. 38,2% des proches donnent leur consentement sans connaître l’avis du patient qu’ils représentent. Ces résultats sont donc sensiblement différents de ceux trouvés par les auteurs cités plus haut. Ils remettent néanmoins en cause de manière réelle la valeur du consentement substitué. Ils sont pour nous l’occasion de nous interroger sur la valeur éthique de procédures issues de concepts philosophiques comme l’autonomie, dont la lecture par les juristes et les médecins, aboutit à ce genre d’impasses opérationnelles. Nous proposons, en conclusion de ce travail, plusieurs pistes de réflexion susceptibles de faire progresser ce débat éthique fondamental, dont la finalité est la protection des sujets incapables dans la recherche biomédicale.</p>